MŒURS
Il
nous était défendu de choisir notre place, laquelle nous était imposée. Nous
étions ainsi mélangées avec les détenues de droit commun, qui étaient toutes
grossières et brutales.
Là,
on partageait le contact le plus affreux, la promiscuité la plus dangereuse.
De
plus, nos Offizierinnen avaient des meurs spéciales et ne se gênaient en aucune
façon pour s’ébattre sur les châlits voisins avec des gitanes qui
bénéficiaient, de ce fait, d’un régime de faveur.
Les
femmes et les jeunes filles, lorsqu’elles étaient belles et saines, étaient
mises dans une baraque spéciale où les S.S. les violaient jusqu’à ce qu’elles
fussent demi-mortes. De là, on les dirigeait vers le crématoire.
Il
existait une maison publique réservée aux détenus qui avaient trois mois de
présence dans le camp. Le médecin devait donner un bon permettant l’accès. Cet
établissement n’était ouvert que le soir après l’appel. Un S.S. en gardait
l’entrée. Le matin, les pensionnaires faisaient l’exercice militaire en
chantant, en short. Le soir, quelques femmes choisies montaient dans les
casernes des S.S.
Le
prix d’entrée était de 2 marks sur lesquels la femme recevait 50 pfg, et le
reste (1,50m.) était versé à des organisations ayant des buts de guerre.
Un
certain nombre de Juifs étaient gardés au camp à la disposition des
kapos : ils était utilisés par des kapos homosexuels allemands pour
assouvir leur passion et étaient protégés par eux.
On
vit une mère et sa fille enfermées et celle-ci obligé de retrousser les robes
de son enfant que l’on faisait violer par un chien.
Et
enfin pour terminer : il y avait des chiens qui étaient vicieux. On
choisissait principalement des jeunes filles ; elles étaient accompagnées
par des S.S. qui les emmenaient travaillé à faire des corvées de pierre. Après
épuisement du travail qui durait douze heures sans arrêt, ces jeunes filles
tombaient de fatigue pour la plupart. C’est alors que les gros chiens se
jetaient sur elles en essayant de les violer. Ils étaient dressés pour cela, je
l’ai vu de mes propres yeux. Ces jeunes
filles étaient décapitées parce qu’elles résistaient, et les S.S. rapportaient
au camp, en nous les montrant, les morceaux des femmes décapitées, accrochés au
fusil ; ils jouaient avec en nous disant que c’était ce qui nous
attendait.
RELIGION
Pour
les croyants de toutes confessions religieuses, aucun secours spirituel ou
moral ne nous a été accordé.
L’assistance
d’un prêtre nous ferait beaucoup de bien, mais ici, interdiction formelle, sous
peine de mort, aux prêtres, d’exercer leur ministère.
Dans
tous les camps de concentration, tout culte religieux était interdit sous peine
de mort.
Le
grand principe état de supprimer tout ce qui, de loin ou de près, touchait à la
pensée de Dieu ; c’est ainsi que, sous le prétexte de désinfection, on
prenait les chapelets qu’on jetait aux ordures, de même que les images saintes
et les médailles qui, pourtant, bien souvent étaient des souvenirs. Les
bréviaires, missels et livres de piété servaient de papier hygiénique.
Je
voulais conserver une petite image sainte mais l’un des prisonniers m’en
dissuada. Cela ne vaut pas à peine, on se moquera de vous et finalement on vous
la retirera.
Je
fus assailli par un groupe de S.S. qui m’arrachèrent ma soutane, brisèrent mon
chapelet, piétinèrent mon bréviaire en ricanant.
Des
religieuses faisaient partie de notre convoi ; les Allemands jetèrent
leurs habits dans la boue en ricanant.
Les
robes et les vêtements sacerdotaux étaient transformés en costume pour les
femmes de la maison publique.
Comme
j’étais prêtre et Anglais, j’avais une corvée supplémentaire à faire. Cette corvée
spéciale consistait à vider un trou plein d’eau à l’aide d’un seau. Je
n’arrivais d’ailleurs jamais à vider ce trou car il se remplissait au fur et à
mesure. J’ai passé de mauvais moments. Les coups et les corvées les plus dures,
les terrassements, m’ont été réservées.
Pour
la recherche des pratiques religieuses, les S.S., à Auschwitz, s’adressaient
aux kapos ou blockalteste.
Le
professeur d’Université de langues orientales (hébreux, arménien et arabe), A.
St-M., fut tué par un stugendienst qui l’avait entendu prier.
Il
arriva à Auschwitz des prêtres qui ne reçurent pas de numéro-matricule. On les
faisait passer par la désinfection et on les affectait à la quarantaine, mais
le lendemain ils étaient envoyés en robe travailler à la gare sous le commandement
de l’Oberkapo et ce kapo les tuait avant le soir.
En
1944, l’été, j’ai autopsié le premier patriarche du synode orthodoxe de Paris,
dont j’ai oublié le nom ; Staline l’avait, par l’intermédiaire de la
Croix-Rouge Internationale, fait rappeler pour réorganiser l’église orthodoxe.
Selon son appartenance et les lois internationales, ce patriarche avait, de
même que les cardinaux catholiques, le droit de se déplacer librement et
n’aurait jamais dû être interné. Lorsque les Allemands connurent la demande de
Staline, ils l’internèrent et l’envoyèrent à
Buchenwald où il devint malade de l’estomac. Il avait auparavant déjà
été opéré deux fois. Il demanda au médecin une troisième opération qui fut
refusée, puis accordée. C’est à la suite de cette opération (quelques jours
après) qu’il mourut.
Un
curé fut martyrisé parmi nous. On l’obligeait à se mettre à genoux, une brique
dans chaque main, et à dire que Jésus-Christ n’existait pas et que le seul
Seigneur était Hitler. Jamais il ne voulait le dire ; il fut frappé des
jours et des jours à coups de matraque, de bottes, de crosses de révolver et
mourut ainsi martyrisé.
A suivre -Scène de tous les jours-
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