Un
des S.S., un garçon de 19 ans qui faisait partie des gardes-chiourmes,
surveillait les détenus occupés à la construction du four crématoire
perfectionné ; il s’approcha d’un des plus solides et des plus beaux
travailleurs, lui ordonna de courber la tête et lui asséna de toutes ses forces
un coup de matraque sur la nuque. Lorsque celui-ci s’écroula, le S.S. ordonna à
deux détenus de le saisir par les jambes de le traîner face contre terre pour
lui faire reprendre connaissance. Après qu’ils l’eurent traîné cent mètres sur
le sol gelé, il n’avait pas repris ses sens et gisait immobile. Alors le S.S.
s’empara d’un tuyau de ciment destiné à la canalisation, le souleva et le
laissa retomber sur le dos de la victime couchée à terre. Il recommença à cinq reprises. Au cinquième
coup, le S.S. ordonna de le retourner face au ciel et lui souleva les paupières
avec une baguette. S’étant assuré qu’il était mort, le S.S. cracha, alluma une
cigarette et s’éloigna comme si de rien n’était.
Fréquemment,
les S.S. envahissent nos baraques au milieu de la nuit, et nous font sortir
tout nus, quel que soit le temps, ramper, courir, etc. ; ceux qui ne
s’exécutaient pas assez rapidement ou donnaient des signes de défaillance
étaient cravachés jusqu’à la mort.
A
peine au seuil des baraques, ils tapent sur les têtes de tous ceux qui passent
devant eux en courant et en se bousculant. Pour activer la rentrée, ils lâchaient
les chiens qui se précipitaient sur nous et nous mordaient. On nous faisait
entrer, puis sortir plusieurs fois de suite pour dresser les chiens.
On
emmenait un interné devant une essoreuse luisante de blancheur et on
l’obligeait à glisser le bout des doigts entre les deux gros rouleaux de
caoutchouc destinés à tordre le linge. Puis l’un des S.S. ou un détenu sur leur
ordre, tournait la manivelle de l’essoreuse. Le bras de la victime était happé
jusqu’au coude ou l’épaule par la machine. Les cris du supplicié était le
principal divertissement des S.S. L’homme, qui avait le bras écrasé, entrant de
ce fait dans la catégorie de ceux qui ne pouvaient travailler, était condamné à
mort.
Un
de leurs « amusements spirituels » était le suivant : un S.S.
prenait à partie quelque détenu, lui signifiait qu’il avait enfreint quelque
règlement du camp et méritait d’être fusillé. Le détenu était poussé au mur et
le S.S. luis posait son parabellum au front. Attendant le coup de feu, la
victime, 99 fois sur 100, fermait les yeux. Alors le S.S. tirait en l’air,
tandis qu’un autre, s’approchant à pas de loup, lui assénait un grand coup
d’une grosse planche sur le crâne. Le prisonnier s’écroulait sans connaissance.
Quand, au bout de quelques minutes, il revenait à lui et ouvrait les yeux, les
S.S. qui se tenaient là lui disaient en s’esclaffant : « Tu vois,
t’es dans l’autre monde. Tu vois, dans l’autre monde il y a aussi des Allemands,
pas moyen de les éviter ». Comme le prisonnier était ordinairement
ensanglanté, qu’il n’avait pas la force de se relever, il était considéré comme
condamné à mort et, après s’être bien amusés, les S.S. le fusillaient.
Autre
« amusement » : un détenu était déshabillé et jeté dans le
bassin. Il tentait de remonter à la surface et de sortir de l’eau.
Les
S.S. qui se pressaient autour du bassin, le repoussaient à coups de bottes.
S’il parvenait à éviter les coups, il obtenait le droit de sortir de l’eau,
mais à une seule condition : il devait s’habiller complètement en trois
secondes. Les S.S. surveillaient montre en main. Personne, naturellement ne
pouvait s’habiller en trois secondes. Alors, la victime était de nouveau jetée
à l’eau et martyrisée jusqu’à ce qu’elle se noie.
Le
2 décembre 1941, le matin à 9 heures, les détenus sont rassemblés. On porte à
leur connaissance qu’un paquet de tabac a été volé à l’un des gardiens et que
le délinquant devait se rendre sur-le-champ. Tous les détenus déclarent ne pas
être en possession de tabac et c’est alors que les brutes S.S. commencent leur
jeu macabre. Ordre est donné à tous de se déshabiller. Il fait une température
de 8° sous zéro. Personne ne fait d’objection, sachant que ce serait un suicide,
et c’est alors qu’on put voir près de 500 êtres humains, tous nus, attendre la
suite des évènements. A midi, les premiers tombaient, les uns morts de
congestion, les autres perdants connaissances. Ces derniers étaient ranimés à
coups de cravache, mais aucun de ceux-là ne se relevait et ils mouraient tous,
les reins brisés. Beaucoup d’autres
détenus furent atteints de congestion pulmonaire et eurent de fortes fièvres.
Lorsque les brutes s’en aperçurent, ils dirent : « Ah ! Vous
avez des chaleurs, eh bien ! On va vous rafraîchir ». ! C’est ainsi
qu’ils furent jeté dans les baignoires d’eau glacée et quand ils avaient perdu
connaissance, ils se noyaient ou étaient jetés à temps hors de la baignoire
dans une salle cimentée où ces loques humaines se traînaient à terre,
cherchaient un peu de chaleur sur le corps d’un camarade qui allait expirer
dans quelques instants. Un de ces malheureux chauffait ses doigts dans le nez
d’un de ses camarades. Les geôliers prenaient les mesures d’êtres vivants pour
leur cercueil et leur apposaient le cachet sur la cuisse, conformant qu’ils
étaient morts, numérotés tant et tant. Dans cette même nuit, il y eut 32 morts.
Si
l’envie leur en prend, les nazis, du haut des créneaux balaieront l’allée
centrale du camp, tueront sans avertissement dans les baraques s’ils entendent
trop de bruit, ou bien une trentaine de brutes vont y entrer brusquement, la matraque et le
revolver au poing, frappant de droite et de gauche. Les hommes sautent par les
fenêtres et, poussés par ceux qui viennent derrière, vont s’accrocher dans les
fils de fer électrifiés qui sont à deux mètres derrière.
Quelques-uns
d’entre nous sont devenus fous.
Les
kapos également, sans acune raison, nous appellent les uns après les autres pour
nous frapper. Ceux qui tombaient sous les coups étaient piétinés.
On soignait au block 21 un très grand nombre
de détenus atteints de fracture de la mâchoire provoquée par des coups de
matraque donnés par les kapos.
On peut affirmer qu’à peu près 80% de ceux-là
devaient être hospitalisés et mourir quelques jours plus tard.
Certains des camarades sont mort parce qu’un
kapo voulait prouver à un autre kapo qu’on pouvait tuer un homme d’un seul
coup.
Les internés de droit commun étaient
terribles (Polonais ou Allemands). Ils assommaient un Juif pour lui prendre son
pain, sa soupe. Un jeune kapo de 18 ans a tué plus de 400 Juifs pour leur
prendre leur ration de nourriture.
Au poste des W.C. où l’on mène en troupeau,
il faut entrer à tour de rôle. Un kapo se trouve devant la porte. Vous entrez
dans le cabinet, et dès que vous y êtes, le kapo commence à compter à haute
voix. Il compte jusqu’à 10 et au bout de ce temps vous êtes obligés de sortir.
Si vous n’avez pas eu le temps de le faire au moment voulu, vous risquez d’être
tué par un coup de massue appliqué sur le crâne. Nombreux étaient mes camarades
qui périssaient quotidiennement au cours de la visite des W.C.
Le Oberkapo de la gare d’Auschwitz avait tué
30 000 détenus afin d’obtenir sa libération et pour être admis dans la
garde personnelle d’Hitler.
Les femmes subissaient le même sort. On les
battait, on les brutalisait. La mortalité parmi elles étaient beaucoup plus
élevée encore que chez les hommes.
M…. s’est livré à des exécutions de 25 coups
de « gummi » sur 3 femmes juives qui avaient mangé des navets crus au
déchargement d’un wagon. L’exécution de cette punition fut abominable ;
les femmes hurlaient ; elles se sont trouvées mal. M… a ordonné à ses
soldats de remettre les femmes tombées par terre sur la chaise et a continué de
frapper.
Une autre fois, les femmes avaient ri et
chanté au retour de la fabrique, il a donné l’ordre de leur faire faire une
heure et demie de pose dans la neige jusqu’au mollet et face à un vent glacial.
Une autre fois encore, les femmes ayant
également ri, il les fit mettre sur deux rangs, puis pris un fouet composé de 5
à 6 cordes à nœuds et les frappa en pleine figure. Pour la moindre chose, nous
étions privées de manger pendant deux jours entiers.
B… passait dans le camp à bicyclette,
renversant sur son passage les prisonnières, s’attaquant toujours aux plus
vieilles, distribuant des gifles sous le moindre prétexte.
J’ai vu une camarade battue à coups de
ceinturon par des femmes S.S.
Il y avait une S.S. condamnée de droit
commun, particulièrement brutale (elle avait assassiné son mari), qui a frappé
et giflé brutalement beaucoup de femmes et, à un moment où je me retournais
pour chercher à voir des camarades, elle m’a giflée très brutalement et m’a
donné un coup de pied dans le ventre.
Un jour j’ai reçu un magistral coup de poing
de la « jument verte », parce que ce qui me servait de chaussures
n’était pas lacé...
Nous l’avions surnommée « la jument verte »
à cause de ses dents qui s’avançaient ; elle avait le chic pur vous
envoyer un coup de poing en plein sur les lèvres, qui vous défonçait la
mâchoire ou vous cassait les dents.
Une autre Oberscherin nous est arrivée, qui
nous menaçait toujours de son révolver ; nous l’appelions « la
dompteuse ». Nous avions dénommé une autre « le sanglier ».
Toutes ces femmes sortaient des camps de jeunesse hitlérienne où elles avaient
subi un entraînement spécial. Elles étaient elles-mêmes très durement menées.
Souvent les femmes S.S. s’amusaient à se
montrer l’une à l’autre la manière la plus forte dont elles dirigeaient leurs
internées : on appelait une internée et en plein atelier elle était passée
à tabac par chacune des femmes S.S. L’une d’elles, qui était petite, montait
même sur une table pour pouvoir ainsi atteindre avec ses pieds la poitrine de
l’internée qu’elle frappait de toutes ses forces.
La « Lagerseerka » était une mégère
maigre et repoussante. Elle se distinguait par son sadisme et des dérèglements
sexuels ; elle était à moitié folle. A l’appel du matin ou du soir, elle
choisissait parmi les femmes épuisées et amaigries la plus belle qui avait
conservé plus ou moins un aspect humain et, sans raison aucune, la fustigeait
sur les seins. Quand la victime s’écroulait, la « lagerseerka » la
frappait entre les jambes, d’abord de sa « peitche » puis de ses
souliers cloutés. Ordinairement, la femme laissait derrière elle une traînée
sanglante. Après une ou deux exécutions de ce genre, la femme devenait infirme
et ne tardait pas à mourir.
Une femme a été envoyée, sur dénonciation
d’une internée allemande, au block des condamnés à mort pour avoir donné de
l’eau à une Juive.
Nous étions arrivées à 120 au camp. Au bout
d’’un mois il y avait 30 de mortes.
Certains jours, on donnait l’ordre au chef du
block de faire mourir un certain nombre de femmes. Ces femmes étaient battues
jusqu’à ce qu’elles tombent. J’ai vu moi-même le Lager se remplir de
cadavres ; on aurait dit des mouettes blanches étalées sur la neige.
A suivre L'APPEL
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