mercredi 18 août 2010
DES ORIGINES A NOS JOURS
A l’aube du 2ème millénaire, entre l’époque où l’Asie était dévastée par l’avènement de ceux que l’on n'appelait pas encore « population du voyage », il y eût une période de l’histoire fort peu connue de pérégrination. Ces peuples du voyage prirent le chemin de l’exil en direction de l’Ouest avec leurs compagnons, ils subirent discriminations, guerres et marginalisation. Seuls nous, descendants de ces peuples, grâce à la transmission orale faite par nos anciens, de générations en générations, sommes en mesure de vous narrer cette longue errance.
LES Rrom QUI SONT-ILS ? Pendant des siècles, leur origine demeura un mystère. Des hypothèses les plus fantaisistes furent avancées : étaient-ils les enfants d’ADAM et d’une femme antérieure à EVE, les descendants des ATLANTES ou les fils d’une tribu perdue d’ISRAËL ? Aujourd’hui, les chercheurs semblent unanimes à reconnaître l’origine indienne des Rrom. Des linguistes ont confirmé que la langue des Rrom était proche du sanskrit et qu’elle s’était enrichie, au cours de leur voyage, de mots empruntés au vocable et vocabulaire des pays traversés.
On ne connaît pas les raisons qui ont déterminé leur départ de l’Inde vers le 10ème siècle, leur première migration les ont conduit du nord de l’Indus vers l’Iran, la Grèce et l’Europe via l’Empire byzantin. Après un assez long séjour en Perse (l’Iran actuel) les Rrom poursuivent leur migration divisée en deux branches ; l’une se dirigea vers le sud Ouest jusqu’en Egypte, l’autre vers le nord ouest par l’Arménie et les contreforts du Caucase. La Grèce les accueillit à partir du 14ème siècle. On les trouve aussi dans une contrée comparable au delta du Nil nommée la petite Egypte.
D’OU VIENNENT-ILS ? Arrivés en Europe, les Rrom fréquentèrent les Pays Bas ; de France ils descendirent en Espagne, se posant en pèlerins de Compostelle et atteignirent l’Andalousie dès qu’elle fût libérée de la domination Maure. Les voici bientôt au Portugal. Dans les premières années du 16ème siècle, ils apparurent en Ecosse et en Angleterre …. Des pays balkaniques, certaines tribus remontèrent en Pologne, en Lituanie et en Russie du sud. Toute l’Europe ayant été sillonnée par ces infatigables voyageurs, ce fût le tour du nouveau monde.
Aujourd’hui les Rrom constituent une communauté estimée à 12 millions de personnes répartie sur tous les continents (Asie Mineure, Europe, Arménie du Nord et du Sud, Afrique du Nord et Australie). S’ils partagent une histoire et une langue ROMANI pour les Rrom et les Manouches, le CALO pour les GITANS, ils ont développé au cours du temps des traditions propres à chaque communauté.
L’association socioculturelle NOTRE ROUTE relatant sommairement les origines et la vie des populations du voyage (Gitans, Manouches, Rrom et autres groupes analogues. Origine et vie dont Tony GATLIFF cinéaste d’essence gitane a tiré un merveilleux film musical qui a pour titre LATCHO DROM que nous vous conseillons de voir ou revoir.
Trop d’affirmations fantaisistes sont encore développées par tout un chacun ressemblant à des images d’Épinal pour certains et à une image du gitan « voleur de poules, à la tire, trafiquants d’or et de papiers, etc. » pour d’autres.
Ce qu’il y a de sûr, c’est que ni l’un ni l’autre de ces clichés ne sont vrais à 100% ni même à 50. Bien sûr il y a chez nous, comme partout ailleurs, des bons, des moins bons et des mauvais, mais aucune de ces affirmations ne peuvent s’appliquer à l’ensemble de nos populations. Mettre ces étiquettes à tous tiendrait à une méconnaissance totale, laquelle conduirait inévitablement au racisme et ceci et valable pour toutes les ethnies. Ce qui est incontestable, c’est que depuis que nous avons décidé de prendre la route avec un style de vie différent et librement consenti celui-ci se confond avec la marginalisation permanente subit dans tous les pays traversés pour arriver en 1939 et la volonté d’HITLER et de son gouvernement de procéder à la tentative d’éradication totale de nos populations et d’autres, car nous risquions, d’après eux, d’appauvrir le sang de la paysannerie allemande. C’est une de ces raisons qui a fait que dans le camp de RAVENSBRÜCK, par exemple, les femmes gitanes et les enfants étaient stérilisés à vie de 6 ans jusqu’à l’âge où médicalement une femme pourrait encore procréer et lorsque l’on sait que ces peuples ont des familles prolifiques s’il en est, on se rend compte ici de l’étendue des dégâts réalisés par la mise en place de cette sinistre politique (chaque famille compte en moyenne 4 enfants.
Si tant il est vrai que tous les génocides ont été reconnus ou sont en passe de l’être, celui des communautés du voyage (Gitans, manouches, et autres groupes analogues) Rrom n’est toujours pas à l’ordre du jour et la nébuleuse mise en place, depuis 1945, a été créée artificiellement afin d’en arriver à l’oubli volontaire organisé.
Déjà lors du procès de NUREMBERG aucun membre de la communauté n’a été convoqué afin de témoigner sur l’horreur des atrocités commises contre nos populations. Aujourd’hui encore, si nous sommes une fois dans l’année sollicité pour un dépôt de gerbe cela intervient un jour bien précis en présence de toutes les communautés mais aucune commémoration propre à notre ethnie et pourtant c’est en pourcentage la communauté qui a laissé le plus grand nombre de victimes dans les camps nazis.
Entre 500 000 et 750 000 Rrom, sur les 1 700 000 (un million sept cent mille, qui vivraient en Europe, ont été exterminés pendant la seconde mondiale par les nazis et leurs alliés. Ce génocide souvent oublié porte le nom de Samudaripen.
Les historiens restent encore prudents et divergent sur les chiffres : les recherches récentes indiquent que près de trois mille Rrom ont été internés dans l’ensemble de la France entre 1940 et 1946. Toutefois, les Rrom français déportés n’ont pas été répertoriés comme Rrom suite à une certaine intégration, ce qui fait dire que la déportation des Rrom français est minimisable. Quelle a été la politique à l’égard des Rrom en France ?
Un rejet antérieur à la guerre.
Le rejet de la population des nomades n’est pas né avec VICHY. Les gens du voyage, terme qui désigne l’ensemble des Rrom, font peur depuis longtemps. Dès la loi du 16 juillet 1912 (en vigueur jusqu’en 1969 !), la IIIème république impose un carnet anthropométrique, accompagné de 2 photos et des empreintes digitales, visé dans chaque commune, à l’arrivée comme au départ. La volonté de constituer un fichier des nomades précède donc celle du fichier juif de 1940, mais il s’agit surtout de pousser à la sédentarisation un groupe qu’on considère plus comme marginal, instable, mal contrôlable que comme ethniquement différent. Les pancartes « interdit aux nomades » marquent le pouvoir alors donné aux maires d’interdire le stationnement dans leur commune.
La méfiance traditionnelle à l’égard des gens du voyage se renforce avec la monté de la xénophobie dans les années trente puis la drôle de guerre. Le 6 avril 1940, un décret interdit la circulation des nomades sur l’ensemble du territoire : les nomades doivent se déclarer à la gendarmerie ou au commissariat et sont astreints à résidence dans les communes du département choisis par le préfet.
Une politique d’exclusion et d’internement.
VICHY et l’occupant allemand disposent donc de lois antérieures pour mettre en place une politique d’exclusion. L’ordonnance du 04 octobre 1940 décrète l’internement de tous les Rrom :
- 1 – Les Rrom se trouvant en zone occupée doivent être transférés dans des camps d’internement surveillés par des policiers français. Les détails sont à fixer par les chefs régionaux,
- 2 Le franchissement de la ligne de démarcations vers la zone occupée leur est interdit par principe
et est accompagnée d’une « définition » qui élargit la notion à tous les forains : « Seront considérées comme bohémiens toutes les personnes de nationalité française et étrangère, sans domicile fixe, et vagabondant en région occupée selon l’habitude des bohémiens (nomades, forains) sans tenir compte si elles sont en possession d’un carnet d’identité, carnet anthropométrique ou non ; ».
Dès l’automne 1940, les Rrom originaires d’Alsace lorraine sont internés dans les camps d’ARGELES-SUR-MER et de BARCARES (Pyrénées Orientales), puis transférés à RIVESALTES. Le 25 mars 1942 est décidé la création du camp des SALIERS où doivent être regroupés les nomades. En Indre et Loire, c’est le camp de la MORELLERIE qui leur est « réservé ». Au total 27 camps d’internement auraient accueillis des Rrom en France.
Sur les quelque 23 000 Rrom recensés à AUSCHWITZ-BIRKERNAU, bien peu ont survécu et BIRKERNAU ne fut pas le seul lieu de déportation et d’extermination des Rrom. Dans la nuit du 2 au 3 août 1944, les survivants du camp « tzigane » de BIRKENAU, isolé totalement du reste du camp, sont « liquidés » par familles entières. Parmi eux, les Rrom déportés de Belgique vers AUSCHWITZ le 15 janvier 1944. 145 étaient français.
La France et l’Allemagne auraient abordé le règlement de la « question tzigane » différemment. Si en Allemagne, les Rrom sont arrêtés et déportés pour des raisons ethniques, la France combat un comportement, le nomadisme et tente d’intégrer les nomades en obtenant leur sédentarisation. Cette optique française permit aux Rrom français, sous contrôle de VICHY, d’échapper à la déportation fatale. Elle ne leur permit pas de retrouver rapidement la liberté. En mai 1946, un an après l’arrêt des hostilités, les nomades sont les derniers internés français à quitter les camps.
Malgré les souffrances subit et le devoir de mémoire qui nous incombe, après cet épisode tragique la vie pour nos populations a reprit avec le voyage, la musique, les mariages, baptêmes et la fête. Mais rien ne sera jamais oublié et la transmission orale faite par nos anciens et une obligation librement consentie faisant partie de notre culture.
Toutes nos populations ont en eux cette musique mélodieuse et captivante qui fait qu’aujourd’hui beaucoup de non-gitans se déplacent pour aller applaudir les groupes Rrom tels que : URS KARPATZ, LES YEUX NOIRS, ANDO DROM, et autres FLORA THALASSA, AMARO DROM, plus près de nous POUNTCHAK etc. ou alors les célèbres musiciens manouches dont le style de musique est le jazz manouche : DJANGO REINHARDT, ALBERT EKIAN, LE HOT CLUB DE France, RAPHAËL FAIZ, BABIK REINARDT etc. et les chanteurs, chanteuses, danseurs et danseuses flamenco dont les plus prestigieux sont pour le chant : CAMARON le grand parmi les grands, MANOLO CARACOL, ANTONIO MAIRENA, JOSE PERET, CHOCOLATE, JOSE MERCE, JOSE PARA, chez les femmes : BERNARDA et FERNANDA DE UTRERA, LA PAQUEIRA DE JEREZ, LA NINA PASTORI, AZUCAR MORENO, LAS GRECAS, LA PIRINICA etc. les danseurs : FARRUCO, FARUCITO, ANTONIO CANALES, les danseuses CARMEN AMAYA, les guitaristes : SABICAS, MANOLO SAN LUCAR, TOMATITO, PEPE HABICHUELA, RAIMONDO PATA NEGRA, MANITAS DE PLATA etc.
Lorsque les non-gitans viennent écouter ils ne comprennent ou ne savent pas pourquoi ces chants toujours empreints de souffrance de joie parfois, les attirent.
Aujourd’hui le groupe gitan le plus en vogue dans le monde a pour nom GYPSY KING, gitan de Camargue, appartenant à la famille de JOSE REYES et de MANITAS DE PLATA.
Il faut se souvenir que le Flamenco lorsque l'on l’écoute devient le feu dévorant de l’âme gitane qui nous gagne, feu inextinguible qui se rallume chaque nuit pour célébrer un mystère ancestral.
Notre hymne international qui est un chant de rappel de tous les gitans du monde s’intitule GELEM GELEM (Allons, allons). Le drapeau de nos communautés comportant une bande horizontale de couleur bleu représentant le ciel, une bande horizontale de couleur verte rappelant le sol et en son centre une chackra de couleur rouge représentant le voyage et les souffrances. Ces deux insignes ont été officiellement adoptés lors du congrès de l’OPRE ROMA tenu à LONDRES en 1971, présidé par le premier président d’honneur de ce premier congrès fédérateur est l’acteur YUL BRUNER, sont devenus les emblèmes officiels de toutes nos populations.
Ce qu’il faut retenir outre nos origines et le génocide c’est la base de la langue Rrom. C’est une langue indo-européenne issue du sanskrit et parente des langues du nord de l’Inde, la langue Romani s’est fragmentée en dialectes, enrichis de termes persans, arméniens, grecs, slaves ou roumains. Les dialectes d’Europe orientale ont conservé la grammaire et un fonds lexical indien ; à l’ouest, ils se sont « créolisés » : l’anglo-romani ; le manouche, fortement germanisé ; le sinto italien ; le calo, hispanisé. En France les Rrom parlent français et romani, langue qui, malgré quelques différences, permet aux gens du voyage de se comprendre de la Hongrie au Mexique en passant par la Suède ; les Manouches parlent encore pour certains la langue manouche, mais utilisent le plus souvent, outre le français, un argot du voyage dont le lexique est d’origine manouche. L’argot français a, quant à lui, fait quelques emprunts à la langue romani, qui de B E R J qui veut dire an en langue manouche et devenue en argot français BERGE, de CHOURI (couteau) qui est devenu SURIN en argot français. Tandis que l’abandon progressif de la langue par les jeunes générations est ressenti comme une perte d’identité, la langue romani a été dotée d’un alphabet et a fait l’objet d’une standardisation.
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