mardi 23 mars 2010

Un rêve évanoui (1ère partie)

Un de nos amis d'Arles, Jean-Pierre PROPHETE, artiste peintre sait également écrire de merveilleuses nouvelles.

Il a la gentillesse de partager avec nous ses écrits, qui nous l'espérons seront bientôt publiés.

Commençons aujourd'hui avec "UN RÊVE EVANOUI"

Pour faire la transition admirez une de ses peintures



UN REVE EVANOUI




Ce soir là, dans un bourdonnement de ruche, la foule s’agglutinait sur les gradins de l’amphithéâtre d’Arles. On se reconnaissait, on s’interpellait, on se congratulait, on se tapait le sandwich ou le paquet de chips entre deux bières. Le chinois « Choum » avec son sourire inimitable et ses petits yeux en forme de boutonnières usagées faisait une petite fortune en vendant ses cacahuètes grillées.


Malgré l’anarchie tumultueuse ambiante, on était entre nous, connus ou inconnus, solidaires dans l’aficion, et tous pareillement curieux de ce qui allait suivre. On pouvait noter une augmentation sensible de spectateurs par rapport à l’accoutumé. Normal, car l’événement était d’importance, pareil déplacement grégaire ne se faisant pas sans raison.


A l’époque, il faut dire que le samedi soir à Arles était très attendu. La « course de nuit » aux arènes avait l’effet attractif de la lune sur l’océan. La jeunesse essayait de s’affirmer en affrontant des vaches emboulées ce qui, pour des raseteurs néophytes est déjà porteur en soi de désillusions et de « barulades » mémorables, et sujet d’hilarité pour les « assis d’en haut ».

En fait, la ville se donnait rendez-vous. C’était l’occasion de rencontrer les autres : les amis qu’on n’avait pas vu depuis longtemps ou depuis la semaine dernière, au même endroit, des parents, des voisins dans une ambiance de bonne humeur. Un bonheur, un vrai, puisqu’il était partagé. A part quelques-uns aisés, qui possédaient chez eux la télé naissante et qui fermaient leurs volets pour garder leurs images, toute, ou presque, la gent arlésienne était là pour vivre des moments qu’elle espérait intenses.

La fête prenait le pas sur le quotidien, par définition banal. On émergeait d’entre nos « emmerdes » personnelles…l’agora reconstituée…le pied !

Cette soirée là se devait d’être mémorable, puisque exceptionnelle…Léonard allait toréer…pour de vrai !

Léonard, était une figure arlésienne, un homme habité par la tauromachie, ne rechignant pas, et au contraire, à faire à la moindre occasion du toreo de salon. Toujours présent, actif pour les courses de nuit, animateur atypique pour un organisateur de spectacles taurins, la coqueluche des ruedos, la star des spectacles populaires locaux et « locos ». Il était habité par son rêve d’être torero, qu’il savait, vu son âge, ne jamais se réaliser. Il fallait remarquer ce feu dans le regard, fruit d’une passion qui mord les tripes, cette main qui, inconsciemment semble toujours caresser le vent, et cette tête qui semble toujours tutoyer les étoiles. Certes, il lui arrivait d’avoir quelquefois la démarche incertaine, mais, lorsqu’on n’est pas marathonien on n’est pas obligé de vivre sa passion avec ses pieds.

à suivre


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